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La mort d’un tout petit, un bébé, est un de ces sujets dont il est si délicat de parler. Et pourtant, le besoin de dire, d’échanger est immense. Beaucoup de parents endeuillés se taisent, ravalant leurs immenses peines face à cette vie très courte. Ici, nous parlons d’une vie de quelques heures, jours, mois de leurs bébés. Ce sujet du deuil périnatal et anténatal concerne aussi le départ in utéro ou à quelques semaines de gestation.

Qu’est-ce que l’anténatal, le périnatal ?

Pour évoquer le deuil périnatal et anténatal, je clarifie brièvement ces deux mots, entourant la venue au monde.

Natal, d’origine latine, signifie le jour de la natalité, la naissance. Les deux préfixes, anté et péri amènent ce temps d’avant ou autour de la naissance. L’anténatal concerne le temps de la grossesse, la vie avant la naissance. Le périnatal, médicalement, balise le temps à partir d’un nombre de semaines de gestation et de jours après la naissance.

Avant de rentrer dans le sujet de cet article, rappelons en amont le désir de donner, transmettre la vie. La vie, par l’arrivée de ce nouvel être en gestation dans le corps de sa maman. Cet heureux évènement est en préparation imaginaire dans les rêveries et projections de ses parents, de la famille. Petit à petit, il prend aussi corps symboliquement. Ceci, par le choix de prénoms, d’un congé maternité à déclarer… Et dans la réalité, peut-être s’agit-t-il de réaménager son style et cadre de vie… Aussi la place de cet enfant se prépare et s’investit dans la foyer.

Mais quand cette vie qui s’annonce s’arrête brutalement et si prématurément, la vie tourne au drame.

La mort d’un enfant est difficilement pensable et va à contre-sens de nos constructions logiques de vies.

Aussi quand la mort surgit à l’aube d’une vie, comment la concevoir ? Comment faire état de cette mort-là et de ce deuil-là ? Et d’ailleurs sur quoi repose ce chemin de l’après ?

Les décès anténataux et périnataux

Bien que la science puisse expliquer physiologiquement la genèse de la vie, le grand mystère de cette vie demeure. Ce mystère de notre incarnation terrestre. Aussi les « raisons » des départs prématurés, selon notre mesure temporelle, de ces petits êtres, sont des épreuves. Elles nous sont difficiles à comprendre, à accepter. Je n’aborderai pas ce point ici, si ce n’est l’amener comme un point d’interrogation ouvert pour chacun.e. Point fondamental à notre présence sur terre.

Ci-après, je répertorie, par quel biais ces interruptions de la vie sur Terre interviennent et le contexte pour les parents.

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Décès par interruption spontanée de grossesse (ou fausse couche)

La perte d’un début de vie lors d’une interruption spontanée de grossesse  (une fausse couche) reste un évennement difficile. Cette interruption n’est pas à minimiser quand bien même, la grossesse n’aurait été que de quelques semaines. Car l’interruption se passe dans le corps même de la maman et un début de grossesse a existé. Même si il n’était pas encore visible. A ce stade, le futur être est difficilement représentable autrement que par le fœtus qui n’a pu aller à terme. Cependant le deuil de cet évènement et de ce petit être en formation a toute sa place.

Décès par IMG, interruption médicale de grossesse

Le décès peut aussi provenir d’une décision par interruption médicale de grossesse (IMG). Dans ce cas, le discours médical prend beaucoup de place, voire prévaut. En effet, une IMG résulte d’une décision médicale, liée à une malformation génétique par ex. Aussi, la maladie parlera de ce bébé/le fœtus, voire il sera réduit dans le discours à la pathologie ou la malformation.

Par ignorance et défense de cette réalité, les discours peuvent rester sur les données médicales pendant longtemps. A cela peuvent se joindre les discours moraux quant à la décision qu’il a fallu prendre d’interrompre la grossesse. Ce premier temps du discours sert à donner des explications raisonnées. Il se peut que la réflexion ne puisse se penser davantage. A ce stade elle élude ou contourne la violence inavouable de l’évènement. Cependant, les répercussions psychiques, les résonnances émotionnelles et/ou physiques peuvent être considérables. Que ce soit pour les parents, la fratrie, dans l’après coup, l’évènement a besoin de s’élaborer plus.

Certains parents font le choix d’une mise au monde de leur enfant (bien que non viable à sa naissance). Ne serait-ce que pour quelques minutes de vie et de rencontre avec lui. En maternité, des soins palliatifs peuvent accompagner la brève vie de cet enfant en conscience. Toute décision quand elle se pose est unique et respectable.

Décès par IVG, interruption volontaire de grossesse

Dans le choix d’un arrêt de grossesse, IVG, le point du deuil est aussi présent. Mais il est probablement encore plus passé sous silence. Au motif qu’il s’agirait d’une volonté, d’une décision personnelle et s’embrouille de discours moralisateurs, voir religieux, quant à ce choix ! La réalité est plus obscure que cela. Cela serait méconnaitre la complexité des décisions auxquelles doivent faire face les femmes. Décisions à un moment et contexte particulier de leur vie. Cette expérience de l’avortement est loin d’être un simple acte car elle laisse des traces émotionnelles souvent douloureuses. Ces émotions là peuvent ressurgir bien des années après, voir même au crépuscule d’une vie.

Décès à quelques jours ou semaines de vie

De la mort subite du nourrisson, à l’accident, à la suite d’un accouchement à risque… Le parent a rencontré son bébé quelques heurs, jours voir plus. Mais la vie s’est arrêtée là, pour cet enfant. La vie a été aussi courte fut elle.

Le deuil périnatal et anténatal

Ce deuil suit les mêmes étapes que tout autre deuil. L’état de choc, la tristesse, le déni, la colère, le marchandage avec la vie, la dépression… l’acceptation.

La légitimité du deuil périnatal et anténatal

Cependant le deuil périnatal et anténatal comporte ses spécificités quant aux ressentis, notamment celui de la légitimité. Ce point est lié à notre façon de graduer le temps, qui dans nos sociétés occidentales est linéaire. Le temps s’évalue en terme de délais, de chiffres. La courte vie de cet enfant vient de plein fouet interroger la durée de l’existence. Face au silence de cette vie, s’installent la solitude et probablement le désarroi. Les parents pensent, bien souvent, que la douleur est plus légitime chez un parent en deuil d’un enfant plus âgé. Cette mesure là n’est évidemment pas celle du cœur mais de notre raison (et par défense).

Aussi par protection de l’effroyable et aussi par grande méconnaissance, ce deuil peut être maladroitement associé à un « petit » deuil. Le parent lui-même et l’entourage peuvent être dans un discours de minimisation de la souffrance. (Face à la légitimité de ce deuil).

Cependant, chaque chose en son temps dans ce drame. Car vivre cette douleur sur terre éjecte du cours normal de la vie et chacun fait avec ses propres repères.

Le peu de souvenirs est inhérent au deuil périnatal et anténatal

L’autre grande difficulté est que cette très coute vie ne s’étoffe pas de (beaucoup) souvenirs. Car peu de moments ont été vécus dans le concret de la vie. Cette venue au monde reste à l’orée de la vie. Aussi l’imaginaire, les rêves autour de cet enfant restent donc en l’état. L’imaginaire n’a pu se poursuivre dans la matière. Les rêves n’ont pas été traversés, vécus dans la continuité. D’où l’étrangeté qui peut être ressentie dans le deuil de cette vie portée, attendue et disparue.

La culpabilité

A cela peut aussi s’adjoindre un grand sentiment de faute imaginaire, de culpabilité chez la maman notamment. Décuplée aussi quand il y a décision d’une IMG, comme évoqué plus haut. (où il faut faire face à une question difficilement pensable et une décision à prendre). Ce qui ajoute du poids au silence et de la grande solitude du deuil anténatal.

Toute vie a le droit à sa peine et à son deuil

Se sentir respecté et légitime dans sa souffrance est primordial dans le long chemin à suivre d’un deuil périnatal et anténatal. La  connaissance de la vie passe aussi par le fait de pouvoir parler, être écouté véritablement. Etre entendu pleinement et ce même dans le silence. Etre simplement entouré.

Aussi, il est important de nommer, humaniser ce petit être, ne fut-ce que par un prénom. L’inscrire redonne aussi la place à l’humanité. L’humanité de ce passage dans l’histoire de la famille (au-delà du temps de vie ou non sur terre). L’inscription symbolique du registre d’état civil, dans un livret de famille, une inscription sur un jardin de souvenirs au cimetière…

Cette place symbolique contribue à la reconnaissance psychique également de cet être dans l’histoire de la famille. C’est important aussi pour les frères et sœurs, si il y en a, ou quand il y en aura. Cela est aussi un support pour parler de cet enfant.

C’est en cela que les rituels sont importants (cérémonies funéraires par ex). Car ils signent l’humanité et la délicatesse de la vie. Il y a le temps de la prise en charge médicale et des termes médicaux puis vient le rituel. Par lui, il y a reconnaissance de cet être dans l’histoire familiale, l’y instituer.

deuil périnatal et anténatal

Nommer l’existence de cet enfant, c’est aussi franchir les abîmes du silence. 

Comment accompagner ce long chemin du deuil périnatal et anténatal ?

Le soutien moral, affectif est d’une grande importance, même longtemps après. Car l’épreuve ne s’arrête pas au temps du calendrier des événements graves et des jours qui suivent. Car c’est la vie entière du parent qui se bouscule, bascule avant de pouvoir retrouver un équilibre.

En réalité, l’histoire de vie de cet enfant se perpétue après ce départ. Ce petit être reste évidement très présent. Il peut y avoir le besoin de faire silence ou celui d’en parler tous les jours. Ce besoin-là peut aussi resurgir bien des années après, quand le moment est juste pour cheminer de nouveau.

En effet le temps psychique est imprévisible. Il suit les méandres et mystères du deuil, qui lui va s’étirer au fil de la vie. Le sens de sa propre vie se compose, décompose, se reprend au fur et à mesure.

Donner du sens à la vie

Nous l’avons vu, tout deuil est légitime et n’est en rien proportionnel à la durée de vie. Cependant, les parents se retrouvent face au peu de souvenirs partagés avec l’enfant et le berceau vide. Aussi quand la vie n’offre pas de preuves tangibles, il est important d’élaborer du sens à la vie. Du sens au passage de cet enfant et du lien avec lui.

La rencontre avec cet enfant, même fugace, est fondatrice pour la suite, pour l’avenir. Quand il n’a pu y avoir ce partage, la vie demande de chercher et ressentir autrement ce lien. (Comme vu plus haut, par les rituels, des temps de partage, d’écriture…). Il est primordial d’écouter et de faire de la place à son propre rythme.

Car après ce départ, la vie peut se figer (et c’est aussi normal ! car dans la réalité, vous avez perdu votre bébé). Cela se traduit par ressentir de l’impuissance en tant que parent face à cet enfant. (Par ex, ne pas avoir pu le protéger). Eprouver une sensation d’irréalité face au choc de cette interruption de vie et sa brièveté sur terre. Cette épreuve peut raviver d’anciens traumas et peut repasser sur une ligne de faille personnelle ou du couple. Dans ce cas, chacun avancera à son propre rythme dans cet après.

deuil périnatal et anténatal

Cet après est un tout immense

vertigineux

il faut du temps pour ressentir, approcher

nommer cet évènement

cet enfant.

L’aide est précieuse

Il est d’autant plus important de ne pas rester seul(e), se laisser accompagner, quand cela est possible. L’aide est précieuse et permet de déposer, reposer la charge mentale et insoutenable de l’évènement traumatique. Bien évidemment, l’entourage n’est pas toujours en mesure d’être présent pour accueillir le chaos. Aussi il est important de le concevoir afin de ne pas vous blesser plus encore. La vie mettra aussi de nouvelles rencontres (amicale, voisinage) pour vous accompagner.

Il y a aussi un temps de réappropriation, de réconciliation avec son corps. Ce corps de chair qui a porté cette vie, garde les traces cellulaires de la souffrance, du trauma. Mais il contient aussi des ressources à venir. Aussi prendre soin de soi passe par laisser passer le chagrin, la perte. Encore une fois, le chagrin n’est en rien proportionnel à la durée de vie.

Chaque deuil est légitime, c’est le vôtre.

Ressentir les signes de cet enfant disparu

Et puis dans ce chemin de l’après, il peut arriver de ressentir cet enfant parti. De recevoir des signes de présence subtile de son énergie. Ceci est très précieux. Réellement précieux pour cet autre lien à présent avec lui. Les parents doivent se faire confiance dans cette approche. (Cependant, l’entourage n’y est pas forcément ouvert).

Puis cheminer, continuer par quelques moyens à sa portée. Comme participer à des groupes de soutien, de paroles, pratiquer la marche, écrire … Tout ceci créer du sens et aussi subtilement fait naître un lien autre avec ce bébé.

Cheminer…

L’après est donc un long chemin. Un chemin qui se défriche, se modèle, se poursuit, s’arrête, se reprend… et de nouveaux regards transforment nos voyages intérieurs.

Je vous propose quelques extraits de mon livre (Livre “Inès, notre chemin de lumières” en attente de parution)

Doucement, une lettre s’efface, se métamorphose

Il m’a fallu tout ce temps pour revenir pleinement à toi, pour avancer vers toi.

Beaucoup de mouvements, de vents pour convertir une lettre dans un mot.

Douleur à douceur.

Je glisse d’un mot à un autre et c’est mon regard sur la vie qui se déplace, bouleversant la tournure de la vie.

 

Le sublime est un tout
Quelques souffles de vent
De nuages
De respirations
De messages subtils
Et tout prend sens
S’élève
Le sublime est un tout en chacun de nous

Il faut du temps

Beaucoup de temps

Dans le ciel

Pour qu’un chemin puisse dessiner l’existence d’une absence

Dans l’invisible

Lui rendre toute sa présence 

Ressources

Je vous propose quelques associations ou podcasts qui peuvent vous aider dans ce trajet. La liste n’est évidemment pas exhaustive. Elle est celle que je peux recommander par connaissance intime du sujet et à ouverture spirituelle.

Vous trouverez aussi des ouvrages en librairie ou ailleurs. Aller toujours vers le livre qui vous appelle, c’est le chemin guide du cœur.

Associations :

Spama, soins palliatifs et accompagnement en maternité (accompagnements bénévoles)

L’enfant sans nom – parents endeuillés

Naître et vivre

Agapa, écoute et accompagnement suite à une IMG, IVG… (Se renseigner pour les conditions d’accompagnements)

Jimmy dans l’autre vie association d’accompagnement des personnes sur le chemin du deuil

Les mamans lumineuses et les papas aussi, association apportant un soutien moral et spirituel aux parents endeuillés

Cœur de cristal, aide morale aux personnes endeuillées et ouverture des consciences

Podcasts :

Ainsi va la vie , parler sans tabou de la mort et du deuil. Vous trouverez différents échanges sur ce sujet dont l’épisode sur le deuil périnatal avec Isabelle de Mézerac (association Spama)