Comment expliquer le confinement aux jeunes enfants ?
Interview de Patricia Blain dans le Ouest France parue le 20.03.20
Cette question permet de soulever le rapport de chacun quant à la parole, à ce que l’on dit ou pas aux enfants : entre ne rien dire aux enfants des évènements de la vie au motif qu’ils seraient trop petits et ne pas les effrayer ou tout leur expliquer à l’extrême, donner trop d’explications qui empêchent toutes réflexions : il s’agit de trouver le bon équilibre.
Chaque enfant, pour décrypter le monde, élabore sa petite explication, sa théorie. C’est essentiel. Pourquoi ne pas partir de ce qu’il en a compris ? L’enfant est écouté, entendu, respecté dans ses réflexions. Puis à partir de là, lui amener l’explication simple des choses, avec des mots clairs, précis, qui ne cherchent pas à édulcorer.
Mais comment raconter une situation dont nul n’a l’expérience ?
Le parent n’a pas réponse à toutes les questions sur le sujet du coronavirus (tout comme il n’a pas toujours toutes les réponses ou les mots pour répondre aux questions souvent existentielles et très justes des enfants). Il peut aussi indiquer que lui-même ne sait pas. Ce qui est important, c’est qu’au- delà de la réponse, l’enfant sente, entende que ses parents sont là pour lui, pour le protéger, prendre soin de lui. L’enfant a besoin de savoir qu’il n’est pas livré à lui-même.
Quels peuvent être les effets négatifs psychologiques de l’isolement chez les jeunes enfants ?
L’isolement et la rupture des liens peuvent être une source d’insécurité, d’angoisse car habituellement l’enfant va dehors, à l’école, chez ses copains, ses grands-parents… Qu’il y ait incompréhension (même si vous lui avez expliqué les raisons du confinement), colère, tristesse, peur : c’est normal. Son mode de vie est complètement bousculé.
Tout ce qui fait son monde et le nôtre, son accroche, ses repères dans la vie se sont arrêtés du jour au lendemain et de plus interdit. Habituellement la scolarité rythme sa semaine et les activités extra scolaires sont souvent omniprésentes, avec moins de temps où l’on reste inoccupé à la maison. Nous sommes dans une société qui comble le vide et fuit l’ennui (qui ne fait plus partie de notre mode de vie). Cette situation forcée nous invite tous à chercher à se divertir par ses propres moyens : lectures, dessins, bricolages, écrire ses pensées, cuisine…
Comment répondre aux enfants plus anxieux de nature ?
Il s’agit de prendre le temps avec son enfant et d’entendre ce qui lui fait si peur. Comment lui-même peut-il trouver quelques solutions à sa portée ? Qu’il y ait de la peur est tout à fait normal. Il ne faut pas chercher à l’éradiquer à tout prix, elle fait partie de la vie. Souvent les parents donnent leurs propres points de vue et ne laissent pas émerger les trouvailles de l’enfant. Il y a à faire confiance au rythme et à la personnalité de son enfant. Cela le rend aussi acteur de sa vie.
Quels conseils donnez-vous aux parents pour qu’ils évitent de se mettre la pression ?
La question est : pourquoi se mettre la pression et mettre la pression à ses enfants ? Surtout en cette période déjà potentiellement anxiogène… Cette pression dit-elle de moi mon inquiétude face à la vie? Mon exigence de réussite ? De montrer que je suis un « bon parent » ? Chacun a ses réponses et pensées éducatives, mais face à ces moments de vie inédits que nous traversons tous : on peut mettre de la souplesse pour nos enfants et pour soi. Par exemple avec les écrans et internet, il ne s’agit pas de faire qu’avec ces outils de la modernité, mais pas sans non plus… Question d’équilibre là encore, que chaque parent aura à trouver.
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